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Brice Marchal, l’illustrateur qui interroge notre société

21 mars 2018

Brice Marchal, l’illustrateur qui interroge notre société

Les illustrateurs sont pour moi des artistes avec un pouvoir un peu magique : arriver à transmettre des idées par le visuel, avec des interprétations parfois multiples, sans avoir besoin d’y mettre de mots. Honnêtement, j’aurais adoré avoir ce pouvoir là. J’ai fait récemment la rencontre de Brice Marchal, graphiste et illustrateur, qui nous raconte son métier, ses aspirations et inspirations.

Hello Brice, parle-nous un peu de ce que tu fais actuellement.
Je suis graphiste indépendant, je travaille dans un atelier. Je le partage avec d’autres graphistes avec qui il m’arrive de collaborer. Je crée des logos, des identités visuelles, des illustrations, des sites web etc. pour différents clients : des grandes ou petites entreprises mais aussi des associations.

Tu crées aussi des illustrations de façon personnelle que tu partages sur Insta et Tumblr.
Tout à fait, c’est ma façon à moi de m’engager, de communiquer sur un thème de société qui me tient à coeur. Je dessine par rapport à mes lectures, à des actualités économiques et sociologiques.

Quand j’ai commencé à travailler pour des entreprises, j’ai essayé de mixer ce style que j’avais à la base avec mes illustrations personnelles, qui n’était pas forcément vendeur, avec les contraintes des commandes. Finalement, ce mélange me correspond bien. Le style est assez brut et laisse moins de place à l’aspect sensible mais le message est plus direct. Après j’adapte bien sûr le style en fonction des commandes.

Mes dessins personnels peuvent eux aussi avoir un style différent en fonction du sujet, de l’éclairage. Je me mets parfois aussi des contraintes personnelles pour être plus créatif.

Parle-nous un peu de ton parcours.
J’ai toujours su que je voulais faire ça. Je suis rentré dans une école des arts graphiques à Paris, puis j’ai fait une autre école à Lille. A la base, j’étais vraiment plus tourné vers le dessin. Pendant mes années d’études, j’ai découvert le graphisme, la typographie, la mise en page… Et j’ai arrêté de dessiner pendant ces années. J’ai travaillé à Paris dans une start-up de design de service, spécialisé dans les politiques publiques. Ils se servent des outils du design sous toutes ses formes pour repenser le fonctionnement de l’administration française.

Le graphisme, là, est vraiment au service de quelque chose. Ça permet de trouver un sens à ce qu’on fait et une utilité assez forte et impliquée, engagée avec la société. C’est pas le cas tout le temps : souvent, l’objectif est de mettre l’accent sur l’esthétique et moins sur le message. J’essaie de retrouver cet engagement avec mes illustrations perso, en mettant davantage l’accent sur le message que j’ai envie de transmettre.

J’ai également travaillé dans une agence qui faisait de la communication interne pour des entreprises sous forme de bande dessinée. Je suis rentré sur Toulouse et j’ai commencé à travailler en indépendant.

Comment s’est passé le retour à Toulouse ?
Ca m’a permis de me recentrer sur moi, d’aller naturellement vers les choses qui m’intéressent. Je reviens au dessin maintenant probablement pour cette raison.

Quels sont tes sujets de prédilection et où trouves-tu l’inspiration ?
J’aime bien dessiner sur l’économie, et l’impact que ça peut avoir sur le travail, et également la technologie.

 Par exemple, ce dessin, qui montre l’impact que peut avoir le numérique sur notre façon de penser. Je fais aussi pas mal de dessins en lien avec la littérature, et parfois les relations amoureuses.

Je suis  également inspiré par des gens comme Jérémy Rifkin, un essayiste américain spécialiste de la prospective.  Il y a aussi Jean-François Simonin, qui écrit plusieurs livres en lien avec ces sujets-là. Notamment l’anthropocène, qui est l’ère géologique dont la caractéristique est le fait que l’activité humaine est le facteur majeur dans les changements écologiques planétaires. Enfin, Pablo Servigne, qui est à l’initiative de la création du concept de collapsologie : la science de l’effondrement des civilisations.

Qu’est-ce que t’apportent tes illustrations personnelles ?
Mes illustrations personnelles me permettent d’être plus libre. Les dessins que je poste sont une démarche très personnelle, j’aime bien m’interroger et faire s’interroger les gens.

Parfois, créer des images sans intentions peut être aussi une sorte de laboratoire que tu peux utiliser plus tard, lorsque tu as des contraintes. Tu te rends compte que telle technique est intéressante et tu peux la réutiliser après.

Peux-tu nous commenter ces images ? 

 C’est une nana avec un pulvérisateur de pesticide. Au premier abord, ça peut paraître girly avec les couleurs, voire joyeux. Mais en fait il y a un paradoxe avec le message qu’il y a derrière. J’aime que les gens aient la possibilité de voir autre chose. Si l’image ne peut pas être interprétée de plusieurs façons, pour moi c’est qu’elle manque de profondeur. C’est intéressant qu’elle ait plusieurs sens.

Des dents anciennes #tooth #dna #colors #illustration #illustrator

Une publication partagée par Brice Marchal (@brice.marchal) le

Ce sont des dents de squelettes. C’est joli et un peu bonbon, c’est un peu lié à la représentation qu’on fait de l’ADN. Il y a aussi un aspect collection, accumulation.

http://bricemarchal.tumblr.com/post/167453064083/air-traffic

Quand on regarde cette image des avions en parallèle, il y a un décalage temporel entre les deux. C’est dans la distance entre ces deux images qu’on va saisir l’aspect critique de la société d’accumulation et de consommation.

#illustration #colors #illustrator #people #street

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Cette image évoque la relation qu’on peut avoir entre les gens qui vivent dans la rue et nous. On passe à côté d’eux, le SDF est insignifiant, il se fait écraser. En même temps, il est appuyé contre la chaussure, c’est ambigu et car ça le protège presque mais c’est une protection vaine car le mec qui marche va forcément bouger. 

Est-ce que tu aurais des conseils à donner pour les gens qui voudraient se lancer ?
Ne pas se comparer, même si c’est quelque chose sur lequel on a jamais fini de travailler. Il faut apprécier le talent de quelqu’un pour qu’il te nourrisse, pour ensuite développer quelque chose de personnel. C’est important aussi de laisser de la place au temps pour que les choses se fassent, ne pas être trop pressé. La création a besoin de pratique, de maturation.

Des expos à venir ?
J’expose à la prochaine Clutcho, le 3 avril aux Jacobins. Et mi-avril au bar Le Taquin, avec un vernissage le 15 à 19h, jusqu’au 7 mai.

Des bonnes adresses pour Bobby 🙂 ?
Le Taquin, parce que j’aime la musique jazz. La Maison  Blanche qui est un bar associatif et un café culturel, avec des petits concerts et des scènes ouvertes.

Retrouvez Brice sur Insta et sur Tumblr !

©Crédits Photos : Laurence Maigret


Toujours à l'affût de nouvelles découvertes, j'aime écouter les créateurs en tous genres me raconter leur histoire ! Dingue de fromage et groupie assumée, je sais aussi rapper, mais uniquement sur La Tribu de Dana.